120) my brain is overdrive

Descendre du bus B. Refermer ce bouquin, L'origine des émeutes en banlieues. Eviter la mémé qui zigzague devant moi. Regarder à droite, à gauche. Avancer. Scruter le rond-point. Jeter un coup d'oeil au bouquin. Hésiter. Lire ou observer ? Scanner le rond-point des yeux. Respirer à plein poumons les pots d'échappements. Essayer de se calmer. Repenser à mon comportement. Essayer de l'expliquer. Ne pas y repenser. S'empêcher d'y penser. Y penser quand même.
Et là, au milieu des petits soucis du quotidien, de toutes ces emmerdes à la con, j'ai compris la musique, comme une hallucination, un la discordant, un ré qui y répond, un fa dièse même parfois, en fait c'est ce que j'aime croire, ne rien quitter des yeux surtout : les volte-faces, les queues de poissons, les courbes, les sons, les allures, les couleurs, l'éclat des métaux dans les rayons de soleil du soir, la cacophonie grave ou aigüe, stridente, impromptue, comme un feu d'artifice anarchique ou un vol d'oiseau au son d'un coup de feu, voire la débandade dans une fourmilière qu'on arrose d'Earl Grey,
le ballet des voitures autour du rond-point,
à 18h, dans une grande ville ;
l'hypnose totale.

Dix minutes après je me suis rappelée que j'étais une sale gosse insupportable, je m'en suis mordu les doigts et je me suis couchée en demandant une légère accélération du temps d'ici à mercredi.